L'Alfumisterie

Autrefois appelés les Mélangeurs, les Alfumistes ont longtemps été considérés comme une division alchimique tout à fait légitime. La multiplication des accidents liés à leurs pratiques nébuleuses ont cependant fini par agacer définitivement l’Athanor, qui, à force de pressions diverses exercées à Nepo et fort de son influence grandissante, est parvenu à en faire interdire l’usage il y a une trentaine d’années.
Les Mélangeurs ont pourtant le cuir épais, et bien que leur profession ne soit plus reconnue officiellement, ils savent encore profiter des recoins où l’absence d’Alchimistes leur laisse champ libre pour exercer leur art incertain.

Origine

L’Athanor n’a pas toujours été la grande université et temple de savoir que l’on connaît aujourd’hui. Il fallut presque cinquante ans post-éveil de balbutiements et d’expérimentations pour comprendre les grands principes alchimiques, pourtant solidement implantés dans la Rémanence. Faute de structure encadrante solide, n’importe qui pouvait s’improviser bidouilleur de brumes, et ainsi invoquer d’incroyables miracles ou provoquer des catastrophes non moins spectaculaires de façon complètement aléatoire.
L’émergence de la cité neutre de Nepo et de la guilde athane permit cependant peu à peu de rectifier le tir. En formant les jeunes esprits et en consignant les découvertes, l’art de l’alchimie selon l'Athanor s’aiguisa au fil des années pour découvrir enfin son véritable potentiel de manière maîtrisée.
Les Mélangeurs étaient ceux qui s’étaient arrogé la science des brumes et de leur exploitation, sur des fondations aussi discutables qu’imprécises. Les érudits sortant des classes de l’Athanor quant à eux se firent appeler assez pompeusement les Alchimistes, en opposition avec les pratiques brouillonnes des Mélangeurs. Au début cela fit sourire, on considérait avec une certaine indulgence ces jeunes coq prétentieux et ces maîtres moralisateurs, si certains d’être révolutionnaires. Pourtant leur méthode fit ses preuves et prouva largement sa supériorité tandis que l’on constatait que les Alchimistes étaient, somme toute, bien plus capables et fiables que leurs rivaux.
Ainsi la tendance s’inversa progressivement dans l’opinion populaire. Les Mélangeurs, perdant en crédibilité et en superbe, ne furent plus soutenus que par les générations vieillissantes pour qui il s’agissait davantage de respect des traditions. Leur nombre décrut également de façon drastique, car désormais quiconque souhaitait se former à l’alchimie, la vraie, entamait un pèlerinage vers Nepo, dont les amphithéâtres ne désemplissaient plus.
Afin d’enfoncer le clou, les Alchimistes commencèrent à parler d’Alfumisterie, et l’appellation moqueuse se répandit dans tout le Refuge. Ils n’avaient qu’à s’appuyer sur les résultats médiocres obtenus par le Mélange, et sur les incidents souvent mortels qui en découlaient. Le fossé entre les deux disciplines cousines se creusa davantage, à un point tel que l’Athanor finit par décréter qu’il était dangereux de passer par quiconque n’aurait pas été formé par ses soins. Le Mélange était déjà boudé, il fut tout bonnement interdit à Nepo il y a trente deux ans, par un décret officiel émanant de l’assemblée des guildes népéennes - surtout porté par la guilde athane.
Comme il avait su se rendre indispensable dans les trois contrées, l’Athanor s’assura ainsi la mainmise sur l’alchimie dans l’ensemble du Refuge, et relégua les Mélangeurs au rang de charlatans et de mystificateurs.

Situation actuelle

Il n’existe plus aucun Mélangeur à Nepo, même officieusement, et pour cause : qui aurait l’usage des services d’un profane alors que la ville regorge d’experts ? Sans compter que la profession étant désormais illégale, son exercice vaudrait au coupable un aller direct vers les geôles humides de la cité neutre. Pourtant ils existent encore, persistant de façon vivace dans les régions les plus éloignées.
En effet, si étudier à l’Athanor est la panacée alchimique, tous n’ont pas les moyens à la fois financiers et contextuels de s’offrir un tel luxe… Sans compter que ceux qui l’ont ne rentrent pas forcément au bercail ensuite. C’est pourquoi certains groupements nomades ne disposent pas d’Alchimiste officiel, laissant la part belle aux Mélangeurs survivants qui y retrouvent les échos de leur gloire d’antan.