À Demi-Mots

Cette mission commence sous les augures les plus étranges. En approchant du centre de missions, nous avons entendu des éclats de voix : Winter et Servilius exprimaient bruyamment un désaccord, et Sabiah m'a expliqué peu après ce qu'elle avait entendu : non seulement notre responsable et Servilius semblent rivaux, s'accusant mutuellement d'avoir mené des acolytes à la mort, mais en plus de cela, notre superviseur a eu l'audace de se plaindre de la mort de Tarren, et de remettre directement en cause notre Inquisitrice. Et dire que rien qu'écrire cela me fait frémir d'horreur !
Enfin. Après cette petite scène et une fois Servilius parti, Winter nous a accueilli pour nous présenter plus en détail la mission. L'ordre n'a pas réellement changé, mais il a évolué : la situation semble étrange, et je crains que les Acolytes qui détenaient le colis n'aient trahi leur fonction. J'espère pour eux qu'ils ont rejoint l'Empereur. Enfin.
Winter sera, d'une certaine façon, du voyage. Si elle ne vient pas tout à fait avec nous -puisqu'elle enquêtera auprès des hautes sphères-, nous aurons avec nous le servo-crâne 45-K-0R pour rester en contact avec elle.
En outre, nous avons obtenu un peu plus d'informations sur le colis que nous devons récupérer. Il est très précieux pour l'Inquisition, et nos vies sont dispensables si leur sacrifice permet de le récupérer. Winter a fait une entorse au protocole en nous en disant un peu plus sur ce colis. Elle n'a pas été aussi explicite, mais nous avons tous pu comprendre qu'il s'agissait d'une jeune, voir une très jeune femme. Nous n'avons ni son nom ni son intérêt pour l'Imperium, mais cela est accessoire.
Notre arrivée sur Varenko n'a peut-être pas été remarquée au sens classique du terme, mais la plèbe de la Ruche devait chercher à nous délester de nos possessions. Bien mal leur en a pris. J'ai tenté de les raisonner de manière civilisée, mais évidemment, ces efforts furent vains face à de tels spécimens. Nous nous en sommes promptement débarrassés, et j'ai apprécié que Khan se soucie de mon intégrité physique une fois le combat terminé. Il m'a par ailleurs aidé à panser mes plaies, mais aussi celles de Sabiah et de Lothar. Je crois que je comprends un peu mieux pourquoi nos maîtres à la Schola et à l'Abbaye appréciaient avoir des assistants durant leurs opérations. Il faudra que je lui en parle plus avant lorsque la situation s'y prêtera mieux. Dans tous les cas, nous avons atteint la ruche à proprement parler sans plus d'encombres que la jambe en charpie de Lothar. Nous avons toutefois eu le temps d'en prendre soin avant d'entrer dans la ruche.
Cette entrée, parlons-en. Alors que nous étions sur le point d'accéder discrètement à la cité grâce aux efforts de Khan, Lothar a entendu quelque chose et a cru bon d'interpeller les Arbitrators de garde à la porte en leur agitant sa rosette Inquisitoriale sous le nez. Je sais que nous n'avons pas vraiment reçu l'ordre de cacher notre présence, mais nos instructions stipulaient tout de même que tout règlement de comptes devait ressembler à une guerre de gangs. Je ne sais pas trop quoi penser de tout cela. Toujours est-il que nous étions entrés, accompagnés du dénommé "Don", qui était apparemment chargé de prévenir une personne puissante de toute anomalie se présentant à la porte.
Dans les bas-fonds, notre enquête peut enfin commencer. Askor nous a mené jusqu'au poste des Arbitrators : les traces d'escarmouche y sont évidentes. Tandis que je menais mon enquête, Khan menait la sienne. Je ne sais ni ce qu'il a trouvé, ni comment, mais il nous a parlé d'un certain Soleil Spectral : c'est une légende ancienne, racontant que lorsque cet astre apparaît, il sème la dévastation. Cette chose sème l'hérésie, et c'est ce que nous aurions vu naître lors de notre première mission ensemble. Cette histoire relatée, nous avons entendu un bruit au rez-de-chaussée.
Quelqu'un nous avait laissé une capsule, posée avec insolence au milieu du hangar. Une proposition de rendez-vous dans une usine désaffectée. Assez étonnamment, notre correspondant est fidèle au poste, et à sa parole. C'est un truand de haut vol, à première vue. Il se présente comme un dénommé Frak. Il nous a confié que l'assaut sur le poste avait été mené par ceux qui gèrent les affaires les plus sombres de cet étage. L'échange qui s'en est suivi était empli de demi-vérités, et de choses que nous savions déjà. Khan a eu la bonne idée de mêler à ses mensonges des vérités liées à nos précédentes missions. C'est sûrement ce qui a empêché Frak d'y voir clair dans son jeu. Je ne suis pas certaine qu'en dire plus sur notre mission sur Fervious était sage, mais c'était probablement la meilleure chose à faire pour obtenir des informations. Lupus nous a indiqué l'ancien spatioport, aujourd'hui désaffecté.
Sous de fausses identités -Vesta, Enogantz, Lolo, Agnès et BT-897-, nous avons pris la route. Mauvaise surprise pour autant, le pont permettant de passer vers ce quartier était gardé -et lourdement, de surcroît. Plus d'une douzaine d'hommes armés surveillaient le passage, arrêtant ceux qui présentaient quelque particularité, ennuyant les femmes, et en bousculant certains. J'avais presque oublié que la lumière de notre Père peinait à briller dans ces endroits reculés. Khan s'est proposé pour faire diversion ; je n'étais pas particulièrement fan de l'idée, mais n'ayant pas mieux à proposer je ne m'y suis pas vraiment opposée.
Les choses ont rapidement dégénéré, malheureusement. Khan a ouvert le feu, bientôt suivi par Lothar. La suite des événements était pour le moins chaotique, et nous avons fini par battre en retraite... sans Khan. Lothar était gravement blessé, Alsmov avait également pris une balle en plein torse, et Khan avait fui dans une autre direction. Sabiah lui a indiqué où nous rejoindre, et nous nous sommes remis à l'abri. J'ai pu soigner Alsmov et Lothar sans grande difficulté, malgré les efforts remarqués et remarquables de Sabiah et de notre techno-prêtre pour se chamailler bruyamment. L'inaction de ma consœur n'était pas vraiment passée inaperçue, et n'avait pas été appréciée par le reste du groupe. J'aurais pu entendre qu'elle choisisse de ne pas prendre part à cet affrontement pour diverses raisons -après tout, je considérais moi-même que ce combat était une perte de temps et de munitions-, mais elle a fait valoir "l'innocence" de ces hommes. Leur innocence !
J'ai préféré ne pas prendre part à ce débat, c'était encore le choix le plus sûr. Mon silence n'a pas eu l'air de plaire à Sabiah. Tant pis.
Khan a fini par nous rejoindre, et le pauvre était dans un état déplorable. L'on aurait pu le croire tombé du sommet de la cité-ruche, jusque dans ses sous-sols. Jamais encore je n'avais établi de liste des plaies aussi longue -du moins pas sur une personne encore vivante. Le fait qu'il respire encore, en tous cas, était clairement la volonté de l'Empereur. Un esprit plus faible n'aurait pas survécu à de telles blessures.
J'ai pu assurer les premiers soins et le maintenir en vie, tandis que nos compagnons repartaient en quête du colis. J'ignorais combien de temps cette opération allait durer, et ni Khan ni moi ne souhaitions ralentir la mission. Il est heureux d'ailleurs que les autres soient partis, car Khan m'a assisté à sa manière lors de l'opération, comme je l'avais vu faire pour Sabiah, et cela a provoqué une… j'ignore comment le dire. Une manifestation ? Je suppose ? De ses pouvoirs. C'était une expérience effrayante, mais ma Foi m'a permis de la surmonter et de mener à bien ma tâche. Pourtant, malgré tout mon talent et le temps que j'y ai passé, j'avais bien conscience que notre ami ne survivrait pas à une sortie d'atmosphère. Il était impératif que nous trouvions un médecin sur place. Mais ici, dans ce sous-sol ?
Ce fut Khan qui, encore une fois, proposa une solution. L'homme que nous avions rencontré plus tôt, le dénommé Frak, l'avait apparemment sauvé après sa chute, en échange de quelques mots glissés à l'Inquisition pour le sortir de ce bourbier. Pour être honnête, j'étais surprise que Khan lui propose cela, sachant ce qu'il était advenu de la précédente personne à qui nous avions fait pareille offre. Dans tous les cas, il m'a dit que c'était lui qui s'était occupé de le récupérer et le maintenir en vie après sa chute, aussi je n'avais d'autre choix que de lui faire confiance.
J'ai escorté Khan sur la route, et une fois sur place, nous avons demandé la route à un enfant. Encore une fois, l'idée me semblait étrange, mais elle fonctionna. Frak nous reçut -avec une grâce étonnante, je dois l'admettre- et accepta d'aller quérir pour nous un médecin. Il revint avec un dénommé Octus -à en juger son comportement, je parierais sur un ancien soigneur des Gardes Impériaux. Cela annonçait une boucherie, mais au moins, il disposait du matériel nécessaire et des compétences adéquates.
Je lui ai offert mon aide pour opérer Khan. Non seulement cela me permettrait de gagner un peu en expérience -ce genre d'opérations ne se présente pas tous les jours-, mais surtout cela me garantirait qu'il soit correctement pris en charge.
Nous avons commencé par retirer les fragments de côtes de sa poitrine, et il a très rapidement perdu connaissance. Tant mieux : il a été prouvé que les cris des patients nuisent à la concentration des praticiens. Octus est reparti forger de nouvelles côtes pour Khan, essayant d'y intégrer les fragments d'os qu'il n'avait pas fait tomber dans sa précipitation.
A son retour, j'ai découvert que le travail d'un Medicae consistait aussi parfois à souder des choses. Désinfecter, souder, recoudre. Il en gardera sûrement une cicatrice, et ses côtes sont plus visibles qu'avant, mais ça tiendra... au moins le temps du retour. Je soupçonne que Khan voudra les faire changer dès que nous serons de retour sur le Vesevia ou au Bastion. Après le départ d'Octus, Frak est retourné vaquer à ses occupations à l'étage, et j'ai veillé sur Khan le temps de son réveil.
Sans grande surprise, cette expérience semble l'avoir choqué. Nous avons échangé un peu sur ce qui venait de lui arriver, j'ai l'ai rassuré autant que possible sur son état… mais j'ai l'impression de ne pas avoir été très efficace. Je n'aurais peut-être pas du lui montrer les bouts de côtes que j'avais récupéré -enfin, je n'allais quand même pas les laisser traîner…
Dans tous les cas, une fois Khan prêt à repartir, nous avons repris notre route en compagnie de Frak. L'inviter était, encore une fois, une idée de Khan, à laquelle je ne me suis pas opposée. L'homme semble plein de ressources, et mon compagnon lui doit deux fois la vie.
Après des retrouvailles émouvantes et ponctuées d'insultes, nous avons fait notre entrée dans le vaisseau où se trouvait le "colis". Une fois sur place, nous avons entendu une fusillade -enfin, Lothar l'a entendue, et pour être tout à fait sincère, j'ai douté un moment du bien-fondé de son annonce au vu de ses précédents délires. Pourtant les autres semblaient prêter foi à leurs dires, aussi j'ai suivi le mouvement. De fait, nous avons vu quelques fuyards quitter le vaisseau, paniqués. Nous avons intercepté l'un d'eux, qui nous a expliqué que son chef coopérait avec une étrange créature aux yeux multiples pour mener des expériences sur une enfant. Nous en avons assez spontanément déduit qu'il s'agissait du Colis que nous recherchions, et avons pressé le pas.
Le colis était détenu dans la chapelle du bâtiment, branchée à une étrange machine. Auprès d'elle se tenaient effectivement celle qui devait être la cheffe des Dents-Noires, ainsi que ce que je devine être un technoprêtre.
J'ignore ce que ce techno-prêtre faisait exactement au colis, mais après quelques minutes de combat acharné, à nous approcher de nos cibles en abattant les hérétiques, j'ai compris que nous étions trop lents. Bien trop lents, même. La chose avait mené son plan a bien, et une sorte de créature que les mots ne suffiraient pas à décrire s'est extirpé de la bouche de la fillette.
Il nous a fallu du temps pour nous ressaisir -à l'exception de Sabiah, qui a fait preuve d'un calme tout à fait remarquable. Nous avons rapidement compris que la force vitale de la chose était liée à celle de la petite, et bien que cela nous en ait coûté, nous l'avons abattue. Après tout, notre objectif était d'éviter que le Colis ne tombe entre de mauvaises mains, et c'était déjà trop tard. Sans moyen rapide de communiquer avec la hiérarchie, nous avons décidé de limiter les risques encourus par la cité-ruche et, de manière plus générale, ce secteur en éliminant la menace représentée par la créature avant qu'elle n'ait le temps de s'étendre.
Frak était assez naturellement bouleversé par ce qu'il venait de se passer. Je me suis assurée qu'il n'avait pas entièrement perdu l'esprit, ce qui aurait été compréhensible au vu de ce que nous venions d'affronter, mais il se portait bien -enfin, autant que la situation le permettait. Il n'avait pas non plus été touché par les tirs de la cheffe des Dents-Noires, aussi se portait-il à merveille.
Nous avons stabilisé le faux prophète, instigateur de cette action maudite par l'Empereur, et l'avons endormi afin d'être en mesure de le ramener à bord et d'extraire les données de sa mémoire. Je n'ai pas tout à fait compris ce qu'Alsmov entendait par là, mais opérer un technoprêtre s'est révélé très instructif, surtout avec l'aide d'Alsmov.
Lothar s'est senti pousser des ailes après ce combat, et a voulu obliger Frak à déposer les armes. Je m'y suis immédiatement opposée, bientôt rejointe par Khan. Non seulement il n'a aucune autorité pour en décider mais surtout, je ne lui accorde aucune espèce de confiance.
Winter a fini par nous rejoindre, et nous a intimé l'ordre de ne pas mentionner Frak dans nos rapports. Je me méfie toujours d'elle, mais que nous nous accordions tous sur ce point me semble de bon augure pour lui. J'espère qu'elle parviendra à le faire accepter parmi les acolytes. En fait, je crois que j'aimerais assez retravailler avec lui.
Dans mon esprit, une seule question demeure : cette créature est-elle capable de nous traquer conformément aux menaces qu'elle nous a adressées ?
 
Car telle est Sa Volonté,